Le blog
En détails

Aimer Dieu, son prochain et sa planète !

Devrais-je, en tant que chrétien, me soucier de la planète ? Quel rapport y a-t-il entre le souci du pauvre et de l’environnement ? Ne sont-ils pas incompatibles ? À quoi bon m’engager alors que la situation planétaire est déjà catastrophique ? C’est à toutes ces questions que Rachel Calvert, présidente de l’association A Rocha et invitée de la Rue du SEL, a bien voulu répondre en nous livrant ses réflexions pleines de sens et d’espérance…

Le monde s’éveille peu à peu aux questions environnementales et de plus en plus de voix s’élèvent pour porter ce sujet. Selon vous, quels points communs et quelles différences y a-t-il entre la vision d’un chrétien et d’un non-chrétien sur le sujet ?

Ce que l’on a en commun, c'est notre humanité. Il y a certaines réalités qui nous sont communes et qu'on soit chrétien, athée, musulman, bouddhiste ou autre, nous partageons cette planète et le dérèglement climatique, l'effondrement de la biodiversité, nous touchent tous. Nous avons cette préoccupation pour l'avenir, pour l'avenir de nos enfants, pour la sécurité, pour la paix et aussi pour l'harmonie.

Ce qui est unique pour les chrétiens, c'est notre conviction que Dieu est sur le trône de l'univers, qu’il règne et que les problèmes que nous connaissons sont en lien très direct avec notre refus de son autorité. D'un point de vue chrétien, la crise écologique, avec l'épuisement des ressources, la pollution, les résultats de notre convoitise débridée, le désir d'avoir un niveau de vie toujours plus élevé, le creusement des inégalités, est finalement la conséquence de notre refus de reconnaître nos limites et d'accepter qu'il y a quelqu'un de plus sage que nous qui a le droit de nous poser un cadre, de nous donner sa loi. Cela donne une perspective sur les racines de la crise.

On peut régulièrement lire ou entendre qu’il faut « sauver la planète ». Que pensez-vous de cette phrase ?

Je ferais un parallèle avec l'évangélisation. On sait très bien, quand on partage l'Évangile, que ce n'est pas nous qui sauvons. Nous sommes là pour annoncer Jésus-Christ qui est le Sauveur. Et pourtant, Dieu nous fait la grâce d'être des instruments entre ses mains ; de façon limitée, nous allons être le canal de ce salut en étant messagers du Christ.

Je dirais que la vocation des chrétiens dans cette crise écologique est similaire : nous sommes absolument incapables de sauver la planète. Dieu seul peut restaurer sa création qui a été abîmée par nos erreurs, par notre péché. Mais là encore, Dieu nous fait la grâce d'être ses instruments. Il peut, par son Esprit, nous apprendre à vivre autrement, à changer d'attitude, à nous repentir, à vivre ce moment sous la seigneurie de Jésus et à rayonner pour lui, même dans les moments difficiles liés à la crise écologique.

Vous parlez de la vocation des chrétiens, selon-vous, la Bible appelle-t-elle chaque chrétien à se soucier et à agir pour la protection de l’environnement ?

Aimer Dieu implique de respecter ce qui a de la valeur à ses yeux. On ne peut pas dire que l’on aime Dieu et piétiner son prochain. On ne peut pas dire que l’on aime Dieu et vivre comme si on se fichait complètement de ce qui lui appartient. J'ai vu une affiche dans la rue dont le slogan disait : « Cette Terre est à nous », j’ai eu envie de réagir parce que la Bible nous enseigne que cette Terre n'est pas à nous, elle est à Dieu.

Si un ami me prête sa maison pour les vacances, je ne vais pas faire n'importe quoi, je ne vais pas tout casser, tout abîmer. Je vais en prendre soin parce que j'ai du respect et de l’amour pour mon ami. C'est un peu la même chose avec l'engagement chrétien pour la sauvegarde de la création. Je veux en prendre soin du mieux que je peux parce que j'aime Dieu, mais aussi parce que j'aime mon prochain. Et je sais que faire des choix responsables en termes écologiques, va avoir un impact positif sur mon prochain, notamment le plus pauvre.

Justement, en parlant de pauvreté, on dit souvent que pour sortir les pays les plus pauvres de leur situation il faut qu’ils se développent. Et ce développement rime bien souvent avec consommation et donc pollution... Œuvrer pour l’environnement et lutter contre la pauvreté semblent donc s’opposer…

Aujourd'hui, il y a énormément d'inégalités dans la répartition des ressources mais aussi de l'empreinte carbone. Il est donc vrai que les personnes qui vivent dans les pays du Sud et plus particulièrement dans des situations d'extrême pauvreté ont une empreinte carbone très basse et que pour avoir un niveau de vie acceptable en termes d'alimentation, d'accès à la santé et à l'éducation, elles auraient besoin d'augmenter cette empreinte.

Cela pourrait se faire si dans nos pays, des gens comme vous et moi, étaient prêts à accepter un niveau de vie moins élevé que celui dont on a pris l'habitude. Cela ne veut pas dire que nous devrions nous éclairer à la bougie mais plutôt que nous pourrions réfléchir ensemble afin de trouver les domaines où nos consommations seraient peut-être inutiles, excessives.

Pour honorer notre prochain comme quelqu'un qui porte l'image de Dieu, qui reflète l'image de Dieu, qui est créé en l'image de Dieu, nous n’avons pas nécessairement à rechercher la parfaite égalité au niveau économique. La Bible ne nous donne pas cet objectif. Néanmoins, elle nous invite à limiter les inégalités ; on peut penser à des mesures dans la loi de Moïse comme le Jubilé, la remise des dettes. La Bible reconnaît que certains deviendront plus riches et que d'autres connaîtront des difficultés dans la vie et deviendront plus pauvres. Mais Dieu donne des pistes pour aider son peuple à limiter ces disparités, pour que ceux qui ont eu plus de succès économique cherchent à s’assurer que chacun puisse avoir les ressources pour vivre, pour travailler.

Beaucoup considèrent leurs actions personnelles comme minimes voire inutiles face à la montagne colossale qu’est le changement climatique. Certains refusent même de s’engager personnellement car « cela ne sert à rien »… Auriez-vous un encouragement pour ces personnes ?

Je pense à Jésus et l'histoire de la veuve qui apporte sa petite pièce au temple. On pourrait dire que, dans les finances, cette petite pièce a assurément fait très peu de différence. Peut-être que le riche qui met beaucoup d'argent ne change pas non plus énormément le budget annuel, mais cela a un peu plus d’impact tout de même. Pourtant, Dieu se préoccupe avant tout du cœur et il est capable de prendre de petites choses pour effectuer des grandes transformations. Si mes choix de prendre soin de la création, de prendre soin de mon prochain, sont motivées par l'amour pour Dieu et par l'amour pour les autres, Dieu va prendre cela et il peut les multiplier pour qu’ils aient un impact sur le plan matériel, physique, mais aussi spirituel. Et non seulement Dieu utilise cela pour me transformer à l’image du Christ, mais il peut l’utiliser pour influencer d'autres personnes. Et quand beaucoup de petits gestes sont mis côte à côte, l’effet cumulé est souvent non-négligeable.

Le sujet vous intéresse ? Alors rendez-vous sur notre page “Aimer les plus pauvres, c’est aussi protéger la création” et sur YouTube pour visionner l'épisode de La Rue du SEL avec Rachel Calvert, sur le thème Pauvreté et environnement !