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Bien nourris, ils apprennent mieux !

Y a-t-il un lien entre nutrition et apprentissage ? Quels processus entrent en jeu dans le développement physique et cognitif d’un enfant ? Pour nous aider à creuser la question, nous avons fait appel à l’expertise de Claire Bizien, pédiatre.

Assoupissement, manque de concentration et d’énergie, estomac qui gargouille… Ces signes sont annonciateurs d’une sensation bien familière : la faim ! Nous y sommes tous sujets, et particulièrement quand vient l’heure du déjeuner. 

Dans les pays en développement, de nombreux enfants expérimentent bien plus qu’une sensation de faim à l’approche du déjeuner. Ils ont faim, et souvent toute la journée. Comment peuvent-ils alors bien grandir, apprendre et devenir des adultes en bonne santé ? 

La faim, un problème de taille 

Dans le monde, selon les chiffres de 2018, 1 enfant sur 3 de moins de 5 ans souffrait des conséquences de la malnutrition. Mais qu’entend-t-on vraiment par malnutrition ? Pour Claire Bizien, pédiatre et membre de notre commission des projets de développement, elle provient généralement « d’un défaut d’apports, d’une pathologie chronique, de problèmes cardiaques ou digestifs. » 

Cet état entrave le développement des enfants au niveau physique, psychomoteur, cognitif et comportemental : 

« ils sont un peu apathiques, tristes. Ils ne grandissent pas bien, ont de grosses carences qui causent des fractures, des diarrhées, des problèmes dentaires et une sensibilité aux infections plus importante », explique Claire. En résumé, « ils n’ont pas ce qu’il faut pour se défendre et pour que le développement se fasse de manière optimale ». 

Le fléau des tout-petits

L’impact est d’autant plus désastreux que l’enfant est jeune. En effet, c’est au cours des deux premières années que se forment les organes, les tissus, le cerveau, les os… 

« J’ai pu assister, en Côte d’Ivoire, à des sessions de dépistage de la malnutrition dans les villages : ils pèsent et mesurent tous les enfants et regardent où ils en sont sur leur courbe de croissance. Ils relèvent aussi le périmètre brachial. En fonction de ces critères, on peut dire si un enfant présente des signes de malnutrition. » témoigne Claire. 

Quand les ressources manquent…

« Pour que le cerveau et le corps se développent bien, il faut que l’enfant consomme certaines catégories d’aliments en quantité adaptée : des lipides (graisses), des glucides (sucre) et des protéines (viande, poisson, œufs). » 

Or, dans certaines régions d’Afrique, l’accès à une alimentation variée est difficile. Par manque de ressources ou de moyens financiers, rares sont les familles qui peuvent se permettre d’acheter des légumes et des fruits. Quant à la viande, elle est réservée aux jours de fêtes. Pour les plus démunis, il n’y a que les céréales (mil, sorgo…) au menu. Seulement, elles sont insuffisantes en termes d’apports nutritifs… 

Hormis le manque de moyens, un autre facteur favorise la malnutrition : le manque de connaissance des mamans. 

D’après Claire, « il leur manque les connaissances de base sur le développement des enfants et sur ce qu’il faut leur donner à manger. Peut-être qu’avec un peu plus de moyens, elles pourraient faire mieux, en achetant parfois des fruits ou des légumes ». 

Pour elle, cela souligne d’autant plus l’importance de la scolarisation et de la formation, notamment celle des filles. 

Malnutrition et apprentissage ne font pas bon ménage

Justement, parlons école. Saviez-vous que la malnutrition peut jouer un rôle dans la déscolarisation des enfants ? En effet, un enfant malnutri aura plus de difficulté à suivre en classe :

« Tu apprends moins bien quand tu as le ventre creux ! L’enfant qui n’a pas mangé est concentré sur son estomac et ne va pas bien écouter ce qu’il se passe à côté de lui. » 

Parce qu’il est un organisme en croissance, une partie de l’énergie de l’enfant sert à son développement physique. Ainsi il a un besoin calorique plus important que celui d’un adulte : 

« Les parents sont souvent étonnés de voir ce que mange un petit de 3-4 ans, mais c’est parce qu’il en a besoin pour grandir. » confirme Claire. 

Pour bien fonctionner, le cerveau a, quant à lui, besoin des sucres que l’on trouvera, par exemple dans les fruits ou les aliments à base de céréales.

« C’est primordial ! Si l’enfant n’a pas le carburant nécessaire pour pouvoir se concentrer en classe, il ne peut pas bien suivre et se retrouve rapidement en échec scolaire. » 

Une cantine à l’école, ça fait la différence

En Afrique subsaharienne, c’est d’autant plus évident ! Car une cantine à l’école, c’est la garantie pour les enfants d’avoir au moins un vrai repas par jour. 

« Dans les cantines scolaires, les cuisinières proposent des repas variés et équilibrés avec, chaque fois que c’est possible, de la viande et des fruits, aliments que les enfants n’ont pas chez eux. » nous explique Claire, qui a pu visiter certains projets Ticket-Repas mis en place par nos partenaires chrétiens locaux, en Afrique de l’Ouest. 

Lors de sa visite à l’école des sourds de Dakar, un de nos partenaires Ticket-Repas, Claire a été marquée par la convivialité des repas : 

« C’était un moment très chouette ! Tu voyais la joie des enfants de pouvoir manger à leur faim ! » 

Des bénéfices multiples

Plus que jamais, les enfants sont motivés à aller à l’école, et les parents à les y envoyer. Si la cantine est le point d’entrée, les bénéfices qu’elle apporte sont visibles à l’œil nu : 

« la musculature de l’enfant est normale, il n’a pas de gros ventre, il parait en bonne santé. Et puis, il court, il joue, il a de l’énergie. C’est un enfant gai ! » 

Les cantines sont aussi des lieux où les enfants (et leurs parents) sont sensibilisés sur les questions d’alimentation. Et si les changements prennent du temps, nous pouvons espérer que la génération suivante, issue de ces enfants qui ont eu la « chance » d’aller à l’école et d’y bien manger, saura et aura les moyens de « faire mieux ». 

 

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Lorah Rakotoniaina