L’allaitement maternel : un enjeu majeur pour les pays en développement
L'allaitement est efficace pour la bonne croissance d'un enfant mais recèle de bien d'autres bénéfices spécifiques aux enjeux des pays en développement.
À l’approche du 16 octobre, journée nationale de l’allaitement en France, voyons comment ce geste ordinaire et pourtant si particulier entre mère et enfant est finalement un enjeu important en matière de développement.
Les bienfaits de l’llaitement pour l’enfant
L’allaitement maternel est bénéfique pour la santé des nourrissons car il répond parfaitement à leurs besoins nutritionnels et immunitaires. Concernant la croissance d’un enfant, les 1000 premiers jours (grossesse comprise) sont essentiels. Durant cette période, le nouveau-né a des besoins nutritifs spécifiques. Le lait maternel, riche en vitamines A et en protéines, favorise son bon développement, en particulier au niveau de son cerveau et de son système nerveux.
De plus, les premières tétées sont composées de colostrum. Il s’agit du premier lait qui est produit par la mère au moment de la naissance. Cette substance épaisse et de couleur jaune opère un effet de « vaccin » sur le nourrisson. En effet, le lait maternel et plus particulièrement le colostrum sont riches en anticorps et en immunoglobines. Ils évitent ainsi à l’organisme du nourrisson certaines infections et pathologies. Le lait maternel démontre alors son efficacité pour prévenir la malnutrition et la diarrhée qui restent les principales causes de mortalité infantile dans les pays du Sud.
D’autres avantages à l’allaitement
L’allaitement comporte également des bienfaits pour la mère. Il réduit le risque de certaines maladies cardiovasculaires, de cancers du sein ou du col de l’utérus. Il permet aussi de récupérer plus rapidement après l’accouchement, d’éviter les hémorragies post-partum et de retarder le retour des règles permettant ainsi d’espacer les naissances.
D’un point de vue économique, le lait maternel – contrairement aux laits et aliments de substitution – a pour avantage d’être une ressource gratuite. Il se trouve également être écologique car c’est une ressource nutritive naturelle qui ne nécessite ni transformation, ni emballage, ni transport.
Un enjeu pour les pays en développement
Même si davantage de mères allaitent dans les pays du Sud que du Nord, peu d’entre elles pratiquent l’allaitement maternel exclusif ou la première tétée de colostrum. Ces deux façons d’agir sont pourtant fortement recommandées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’UNICEF dans le cadre du troisième Objectif de développement durable (ODD) qui promeut une bonne santé et le bien-être de tous à tout âge. En effet, ces deux pratiques sont essentielles en matière de lutte contre la malnutrition et la mortalité infantile.
L’allaitement maternel exclusif consiste à nourrir un bébé uniquement avec du lait maternel, en excluant toute autre nourriture ou boisson. Les experts assurent que les enfants en bénéficiant ont 14 fois moins de risques de mourir que ceux qui ne sont pas allaités. Pourtant, au niveau mondial, ce sont moins de 40% des enfants de moins de 6 mois qui sont allaités exclusivement au lait maternel. Selon l’UNICEF, ce taux est le plus bas en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest où seulement 25% des nouveau-nés sont concernés.
Pour lutter contre la mortalité infantile, la première tétée de colostrum, doit se faire le plus rapidement possible. En effet, le risque de décès du nourrisson augmenterait de 41% lorsque la première tétée est repoussée de deux à vingt-trois heures, et de 74% au-delà de vingt-quatre heures. Pourtant, ce sont seulement 40% des nourrissons qui reçoivent cette première tétée à moins d’une heure de leur naissance en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest.
Les raisons sous-jacentes
Comment expliquer que ces pratiques ne soient pas plus courantes dans les pays en développement ? Si parfois la mère doit faire face à des problèmes de lactation, d’autres raisons peuvent être évoquées comme le manque d’information qui entraîne la mise en place de mauvaises pratiques.
En effet, dans des pays au climat chaud, il peut être contre-intuitif pour certaines populations de ne pas donner de l’eau aux nourrissons pour les hydrater. Pourtant, le lait maternel en est constitué à 88% et il permet ainsi une bonne hydratation des nouveau-nés. Donner de l’eau à son bébé est d’autant plus préjudiciable que sa qualité peut être néfaste pour le système digestif du bébé.
L’allaitement exclusif comporte également un caractère contraignant car il requiert la présence continue de la mère auprès de son enfant. Or, lorsque ce dernier est gardé par la famille ou par des proches, les mauvaises pratiques peuvent s’accumuler.
De plus, en fonction des pays, il peut arriver que certaines coutumes remplacent la première tétée contenant le colostrum. Des thés ou infusions sont parfois donnés en Inde ou en Indonésie les premiers jours de vie du bébé, ne permettant pas au nourrisson de recevoir cette tétée « vaccin », essentielle à son système immunitaire.
Par ailleurs, les producteurs de lait maternisé ou de nourriture de substitution voient les pays en développement comme des marchés prometteurs et investissent davantage dans ces régions en influençant la perception des familles sur leurs produits. La promotion de la nourriture diversifiée peut être considérée comme un facteur de modernité. Seulement, elle compromet l’allaitement maternel exclusif et peut également accroître la pauvreté des foyers à cause du prix souvent élevé des laits industriels.
Pour être efficace, l’allaitement est un processus qui doit être conseillé, encouragé et encadré par des personnes de confiance apportant des informations sûres. La décision d’allaiter constitue toutefois un choix très personnel pour chaque mère et ce n’est pas toujours quelque chose de facile à mettre en œuvre. Si chaque famille est bien évidemment libre de ses actes et essaye de faire au mieux, force est de constater que l’allaitement maternel a pour lui de nombreux points positifs, en particulier dans le contexte des pays en développement.
Pour aller plus loin
Dans les pays en développement, les femmes ont un rôle important dans la lutte contre la pauvreté. Pour en savoir plus, lisez cet article de réflexion écrit par Nicolas Fouquet, en charge de l’éducation au développement au sein du SEL :
Clara Alegre est étudiante à l’Institut d’Études Politiques de Bordeaux. Elle est engagée auprès du SEL en tant que bénévole pour la Course des Héros puis en tant que stagiaire. Elle est sensible aux questions de pauvreté et de développement, domaine dans lequel elle souhaite effectuer son Master.