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LIBAN : une lumière dans les ténèbres

Depuis le Liban, Sophie Nasrallah, revient sur les terribles événements ayant secoué Beyrouth l’été dernier et sur la situation globale du pays. Chargée de communication pour MERATH, partenaire du SEL, elle expose également l’action menée par cette association chrétienne libanaise.

Pourriez-vous, pour commencer, nous rappeler ce qui s’est passé au début du mois d’août dernier ? 

Sophie Nasrallah : Le 4 août 2020, il y a eu une double explosion au port de Beyrouth, se situant au cœur de la capitale. Il y a eu de nombreux morts et blessés et des centaines de milliers de personnes laissées sans domicile. La population a violemment été impactée puisque le Liban était déjà confronté à de nombreuses crises. 

Justement, pourriez-vous nous en dire plus sur la situation du pays ? 

Depuis l’automne 2019, le pays est touché par une grave crise économique. Les prix des produits de base ont explosé, le chômage aussi. Le Liban ayant fait défaut de paiement sur sa dette, les banques ont restreint l’accès aux capitaux. Il faut savoir qu’ici, il n’y a ni filet de sécurité sociale ni système de retraite, les gens vivent littéralement de leurs économies auxquelles ils n’ont désormais plus accès. 

Et la COVID-19 dans tout ça ? 

Les mesures prises pour éviter que le virus se propage ont été efficaces au niveau sanitaire mais catastrophiques économiquement. Beaucoup dépendent de revenus journaliers, notamment les réfugiés syriens. Ils travaillent au jour le jour selon les besoins alors le confinement les atteint énormément. Ils n’ont pas d’économies, ils n’ont rien. En termes d’éducation, ça a aussi été compliqué avec la fermeture des écoles. Dans la plupart des cas, il n’y a pas d’enseignement à distance. 

Concrètement, comment font les gens au quotidien ? 

Je me pose aussi la question : comment les gens ont-ils réussi à tenir ? Ça doit être lié à la forte solidarité intra-familiale. Il y a aussi beaucoup de Libanais à l’étranger qui envoient de l’argent à leur famille. À cela s’ajoute l’aide humanitaire. Les derniers chiffres montrent que de plus en plus de personnes ne survivent que grâce à ça. 

En parlant d’aide humanitaire, pourriez-vous présenter MERATH ? 

MERATH est une association chrétienne libanaise. Nous mettons en place des projets d’assistance humanitaire, de développement et des projets éducatifs. Notre spécificité c’est que nous faisons cela à travers un réseau d’environ 50 Eglises partenaires implantées au Liban, en Syrie et en Irak. Elles sont sur le terrain, tandis que nous nous chargeons de la partie technique. Nous aidons à penser et lancer les projets puis à nous assurer que tout se passe au mieux. Nous arrivons à aider en moyenne 10 000 familles par an. 

Dans le contexte de ces crises, une action d’urgence a été lancée, pourriez-vous nous présenter ce qui a été financé par le SEL à cette occasion ? 

Le SEL a aidé à financer de nombreux bons alimentaires ainsi que des milliers de kits contenant des produits d’hygiène ou ménagers devenus extrêmement chers. Le SEL a également contribué à fournir des kits d’hivernage pour que les familles restent au chaud. 

Qui aidez-vous ? 

Ceux qui sont le plus dans le besoin. Pendant des années ces gens étaient essentiellement des réfugiés syriens mais avec la crise beaucoup de Libanais sont aujourd’hui concernés. Il y a aussi une population très vulnérable de travailleurs migrants qui ne peuvent pas rentrer chez eux par manque d’argent et qui sont parfois retenus de force par leurs employeurs. 

Pourquoi travailler avec des Eglises ? 

Parce qu’elles ont à cœur de secourir les plus vulnérables, comme Jésus qui avait compassion des gens, les aidait, les guérissait, sans rien attendre en retour. Elles voient les autres comme des êtres créés à l’image de Dieu. Une vraie relation se forme, l’aide apportée n’est plus seulement matérielle, elle est aussi émotionnelle et psychologique. Pour beaucoup de bénéficiaires c’est encore plus important ! 

Au milieu de cette situation particulièrement difficile et qui dure, comment continuer à vivre dans l’espérance ? 

Honnêtement, c’est très dur. Par moment on est découragé, d’autant plus que lorsqu’on analyse la situation on ne voit aucune issue à court terme, aucun espoir à vue humaine. Mais justement, je dirais que ça nous rappelle tout simplement qu’il n’y a pas d’espoir en dehors de Dieu. C’est ce que les Eglises nous disent : leur espoir, leur espérance en Dieu, c’est ça qui les fait tenir ! Quelqu’un m’a dit que « notre être est tel une goutte d’eau dans un désert de misère mais là où cette goutte tombe, une fleur pousse. » La misère continue d’avancer, les besoins sont toujours plus grands mais le soutien que l’on apporte permet néanmoins à des fleurs de pousser. Et chaque jour, les Eglises voient ces fleurs, c’est ça qui les aide à aller de l’avant.