Le blog
En détails

L'accès aux soins, quel parcours !

Sahra Mayala, directrice du CEPROMOR & AEPH et Nathan Bundutidi, médecin et chargé de programmes de l’association, détaillent les obstacles que peut rencontrer la population rurale en République démocratique du Congo (RDC) pour accéder à des soins de qualité et être en meilleure santé.

Quels sont les problèmes de santé majeurs que vous constatez en zone rurale ?

Sahra Mayala : La population souffre régulièrement de maladies hydriques, maladies causées par le contact avec l’eau insalubre. Ensuite, de nombreux enfants sont touchés par la malnutrition. Enfin, nous nous intéressons particulièrement à la santé des femmes. Les conditions dans lesquelles elles accouchent sont souvent très mauvaises. Sans équipement adéquat, sans sage-femme, la maman ou l’enfant, et dans le pire des cas les deux, peuvent perdre la vie.

Nathan Bundutidi : Nous avons constaté que beaucoup de villages n’avaient pas de maternité répondant aux normes, ou que leur personnel n'était pas qualifié. Dans certains endroits, les femmes doivent parcourir des kilomètres pour accoucher, cela favorise la morbidité maternelle. J’ai déjà reçu des appels pour m’informer qu’une femme avait succombé en cours de route à cause de complications liées à l’accouchement.

Qu’en est-il de l’accès aux soins ?

SM : Comme nous l’avons évoqué plus haut, dans les milieux reculés et notamment ruraux, la population n'a pas facilement accès aux centres de santé ou aux hôpitaux. La distance est vraiment grande entre les villages et le centre de santé.

Les gens ne trouvent pas facilement de médecin quand ils tombent malades ni les médicaments nécessaires pour se soigner. Il existe de petites pharmacies dans les villages et ils s’approvisionnent quand même en médicaments mais sans ordonnance. Or, l’automédication est déconseillée car dangereuse pour la santé.

Pour résumer, il est donc vraiment difficile d’accéder aux centres de santé, aux médecins, aux médicaments ou aux soins appropriés pour être soigné.

Qu’est-ce qui peut être mis en place pour répondre à ces problématiques ?

SM : Sensibiliser les jeunes filles aux questions d'hygiène menstruelle et intime pour qu’elles acquièrent les bonnes pratiques. Former des animatrices nutritionnelles afin qu’elles sachent prendre en charge les enfants malnutris et qu’elles puissent l’enseigner à d'autres pour que les plus jeunes aient une meilleure alimentation et soient en bonne santé !

NB : Oui, renforcer les capacités des relais communautaires qui travaillent aux côtés des infirmiers ou des médecins et qui jouent le rôle de pont entre la communauté et le centre de santé permet de prévenir des problèmes de santé.

Ensuite, on peut aussi consolider les compétences du personnel de santé et améliorer les conditions et l’équipement en matière d’hygiène en milieu hospitalier. Par exemple à travers la construction de latrines hygiéniques, d’incinérateurs ou par l'installation de fosses septiques et de fosses à placentas. Et pourquoi pas mettre en place un programme et un comité d'hygiène dans les centres.

Concrètement, comment cela est-il rendu possible ?

NB : En travaillant avec les autorités du domaine de la santé qui sont aussi dans le milieu rural. Elles nous aident à pouvoir implémenter nos projets en suivant les normes du pays parce que nous nous alignons bien sûr à la politique du pays.

SM : Dans la sensibilisation, construire avec les leaders religieux, principalement chrétiens mais pas seulement, est également important. Ils sont une porte d'entrée pour atteindre les populations et peuvent être de réels acteurs du développement. Ce sont eux qui ont l’autorité pour parler et transmettre des messages. Nous les informons parce que certains leaders peuvent être ignorants des maladies qui existent. Ensuite, à leur tour, ils sensibilisent leur communauté.

NB : Il faut aussi prendre en compte le contexte rural qui n’est pas facile. C'est un contexte où la population est très pauvre, où la population a ses croyances par rapport à la santé, où la population a aussi plusieurs pratiques dites traditionnelles. Essayer d'intégrer et de valoriser ces pratiques en gardant ce qui est bon mais en rejetant ce qui ne l’est pas est essentiel pour expliquer, aux hommes comme aux femmes, ce qu’ils peuvent mettre en œuvre pour être en meilleure santé.

Que propose le CEPROMOR & AEPH pour améliorer l’accès à la santé ?

SM : Avec l’appui de nos partenaires et l'accompagnement de la population, nous construisons et réhabilitons des centres de santé plus proches des villages. Cette demande est venue des villageois et principalement des femmes. Cela leur permet de ne pas avoir à parcourir de longues distances pour aller accoucher parce que certaines accouchent en cours de route tellement l'hôpital est éloigné.

NB : Aujourd'hui nous avons construit ou réhabilité plus de six centres de santé mère et enfant. Nous avons aussi des centres de santé WASH et NUT. Les WASH sont spécialisés sur les questions relatives à l’eau, l’hygiène et l’assainissement. Les NUT sont pour la prise en charge d’enfants malnutris.

En quoi l’engagement chrétien est-il pertinent dans le domaine de la santé ?

SM : Le message chrétien nous rappelle qu'en tant qu'enfants de Dieu, nous sommes appelés à prendre soin de nous-mêmes et aussi à prendre soin des autres.

NB : Oui, et en tant que chrétien, je pense également que le malade n'a pas seulement besoin de médicaments, il a aussi besoin d'un soutien psychologique, d'un soutien spirituel. Je suis médecin et lors de mes consultations, je peux arriver à convaincre, à impacter la personne malade qui est en face de moi en lui montrant de l'amour. Au lieu de voir en cette personne, un simple patient vulnérable et de le considérer avec rejet, je peux manifester de l’amour. Nous pouvons ainsi témoigner de Christ comme une personne qui peut guérir le malade et qui vient au secours de ceux qui sont en souffrance !

Pour soutenir le travail de nos partenaires Santé, comme le CEPROMOR & AEPH, faites un don au fonds Santé du SEL.