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Haïti : une violence qui appauvrit

Haïti, île des Caraïbes riche en culture et en ressources, se trouve aujourd'hui au cœur d'une tourmente sans précédent. Plongeant ses racines dans un contexte chaotique où pauvreté, instabilité politique et violence endémique se sont conjuguées pour créer cette tourmente, la crise actuelle menace de plus en plus la population locale.

Appelé autrefois « perle des Antilles », Haïti est aujourd’hui le plus pauvre pays d’Amérique Latine et des Caraïbes. Nous vous invitons à lire notre article dédié pour mieux comprendre la situation de pauvreté de ce petit État caribéen. Historiquement marquée par une instabilité politique et une corruption généralisée, le pays a plongé dans le chaos depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse le 7 juillet 2021.

Un climat politique instable

Déjà fragilisées par des décennies de mauvaise gestion, de négligence, les institutions gouvernementales haïtiennes ont été mises à genoux par les événements tragiques du 7 juillet 2021 qui ont provoqué la vacance du pouvoir. Avec un Premier ministre contesté, Ariel Henry, Haïti n’a donc plus d’autorité légitime. Ajouté à cela, le pays n’a plus d’élus car aucune élection présidentielle, sénatoriale, législative ou municipale n’a été organisée au terme des mandats précédents. Malgré un accord avec les représentants des partis politiques pour organiser des élections présidentielles en 2023, Ariel Henry a reporté le processus, invoquant la violence des gangs comme justification. Cette décision a déclenché des manifestations à travers le pays, exacerbant les tensions jusqu’au 29 février 2024 où la violence des gangs, qui sévissait déjà, a éclaté.

Gangs et pouvoir

Décrié de son vivant, le président Jovenel Moïse, à qui les citoyens demandaient des comptes sur l’utilisation des fonds envoyés par l’aide internationale, avait fait le choix d’employer la force au travers de milices armées afin d’écraser les manifestations. Mais ces groupes armés, après avoir réprimé les contestations populaires, se sont retournés contre le gouvernement pour former ce qu’on appelle aujourd’hui des « gangs » qui, suite à l’assassinat du président Moïse, ont assis leur pouvoir en semant la terreur. Rivaux, ces derniers ont cependant répondu à l’appel du chef de gang Jimmy Chérizier pour former une coalition appelée Viv Ansanm (Vivre ensemble), dans le but de renverser le Premier ministre en exigeant sa démission. C’est ainsi que, depuis le 29 février, des attaques coordonnées contre des bâtiments gouvernementaux et des infrastructures clés se sont multipliées, profitant de l’absence d’Ariel Henry qui était au Kenya pour signer un accord concernant la lutte contre la violence des gangs grâce au déploiement d’une force de police multinationale. A ce jour, les principales voies de circulation, le port et l'aéroport sont sous leur emprise et plus de 4 500 détenus auraient été libérés de prison[1], plongeant la population dans un cauchemar quotidien. La coalition dirigée par Jimmy Chérizier contrôlerait désormais 80 % de Port-au-Prince[2].

Un espoir de transition

Le 11 mars 2024, les gangs ont finalement obtenu gain de cause : l’annonce de la démission d'Ariel Henry en tant que Premier ministre et Président de la République par intérim. Un accord a toutefois été conclu entre les dirigeants politiques du pays pour mettre en place un conseil présidentiel de transition qui nommera un Premier ministre ce qui marquera le départ effectif d’Ariel Henry. Officiellement créé le 12 avril 2024, et ses neufs membres ayant été nommés le 16 avril, le conseil sera chargé d’assurer une transition politique et de rétablir l’ordre et le calme dans un pays ébranlé par la violence.

Une vulnérabilité exacerbée

Pour Haïti, et en particulier Port-au-Prince, ces derniers mois ont été marqués par des pillages et des incendies de nombreux magasins, pharmacies, bâtiments publics mais aussi églises et écoles chrétiennes. En conséquence, le pays – déjà estimé comme le plus pauvre du continent américain et l’un des plus pauvres du monde – est confronté à une grave crise des services essentiels, avec un accès de plus en plus restreint à l'eau potable et des hôpitaux en manque critique de matériel médical et de médicaments. Ces différents facteurs couplés aux déplacements de population – plus de 50 000 personnes auraient fui la zone métropolitaine en trois semaines selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM)[3]  – aggravent la propagation du choléra, avec plus de 79 000 cas potentiels signalés en 2023 selon l’UNICEF[4]. L’ONG alerte quant à un risque élevé de crise sanitaire majeure dans le pays si rien n’est mis en place pour l’arrêter. Parallèlement, la malnutrition a atteint un niveau record notamment du fait de la violence armée qui perturbe l'accès au grenier d’Haïti : l'Artibonite. Ainsi, un quart des enfants en Haïti souffrent de malnutrition chronique.

Solidaires face au chaos

En réponse à la pire crise humanitaire à laquelle Haïti fait face depuis des années, de très nombreux organismes humanitaires, comme l’UNICEF ou l’OIM, ont mis en place des actions d’urgence. Les États-Unis ainsi que l’Union Européenne ont, quant à eux, accordé une contribution financière à l’aide humanitaire et à la mission de sécurité multinationale (pour les États-Unis) qui devrait soutenir les forces de l’ordre haïtienne face aux gangs. Toutefois l'aide internationale peine à arriver du fait de la fermeture des principaux points d'entrée internationaux et du contexte de « guerre civile ». Mais la population peut également compter sur le soutien de nombreuses Églises qui, bien que confrontées elles-mêmes aux pénuries et à la violence, restent engagées et dévouées à apporter un peu d’espoir et d’amour aux plus vulnérables.

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